L'époustouflant nouvel an New-yorkais ?
Mon nouvel an, c'était avec Sylvain. Nous avions prévu une bête soirée à Riverside Drive, au 456 au bord de l'Hudson (cf. plan simplifié de NY) où nous dormons. Carolyn, notre cosquatteuse américano-coréenne, s'est permis de nous appeler vers 20 heures le 31 (2 heures du matin du samedi premier, en Europe occidentale) pour proposer une soirée sur des toits, où elle avait été invitée par un type qu'elle a rencontré sur internet, et je ne suis pas encore certain qu'elle l'ait vu. Elle trouvait cet endroit trop bruyant et s'est enfermée quelque part pour faire de la programmation (c'est-à-dire en gros faire de l'informatique). Une esquisse de la merveilleuse personnalité de Carolyn est donnée en annexe. Après avoir un peu temporisé (notre volonté de « fêter » le nouvel an frôlant, à Sylvain et à moi, le zéro comme chaque année), nous nous sommes élancés vers 22 heures pour la seconde soirée prévue par Carolyn. 80 Lexington. Comprendre : à l'intersection de la 80ème rue et de Lexington avenue (cf. plan), subtilité qu'il a s'agit de comprendre comme on a pu. Autant le dire tout de suite, nous ne verrons Carolyn qu'au moment de prendre un cab (taxi) en commun pour le retour. Savoir aussi qu'à Manhattan, les rues sont les artères allant d'Est en Ouest numérotées du nord (pointe de l'île) au sud (où l'on arrive au Bronx), les avenues allant du Nord au Sud, numérotées pour certaines (comme la sixième avenue) et pas pour d'autres (comme, justement, Lexington avenue), ce qui en fait une ville extrêmement facile à appréhender.
Que se passa t-il entre onze heure et minuit vingt ? Essentiellement ceci que nous cherchions des toilettes dans New-York. Cette ville est hostile à ce genre de démarche, et ainsi est-on tellement peu de choses que quand il importe d'uriner toute grandeur d'âme s'effondre. Au lieu de rendez-vous prévu avec Carolyn, des foules de gens hétéroclites : respectables dames mures ayant raté la sage acceptation des effets corporels de l'accumulation des années, dandys nonchalants, banc compact de filles de 20 ans en robes courtes et jambes nues (toujours ces gestes de main furtifs et peu gracieux pour remettre cette robe rebelle qui continue de remonter irrésistiblement au delà de ce que nous appellerons le raisonnable à chaque mouvement de leur part), couple de retraités souriants, armoire à glace noire et élégamment mise, armoire à glace noire et rustrement vêtue. Et tous ces gens entrent et sortent par une porte s'entasser dans une cage d'escalier sur trois étages, décretant les uns après les autres qu'il y a trop de monde, que l'appartement où d'autres gens sont entassés ne permet même plus de déplacer ses épaules, etc. Carolyn est là-dedans : nous sommes arrivés avant elle dans la rue mais alors que nous cherchions à résoudre notre problème de pleine vessie, elle est montée.
Minuit, ça a fait boom. Quel éclat, quelle grandeur, la foule en liesse, feux d'artifices, envoie frénétique de textos groupés, etc. Du moins, j'imagine, car pour ce qui me concerne, j'étais donc devant mon building dans Uptown (cf. plan, à l'appellation "dormir"), bien loin de Time Square (cf. plan) où le nouvel an New-yorkais se vivait réellement. Vraiment, pour moi, ça a simplement fait boom, avec quelques cris de joie un peu trop éparpillés pour générer l'onde sonore qui fait qu'on se sent littéralement vibré au milieu d'une masse à l'unisson. Devant mon building dans un quartier terne, avec la seule perspective d'aller m'entasser dans une cage d'escalier étroite vers ce mystérieux appartement où quelques centaines de New-yorkais (ou autres) ont pu monter ce soir, péniblement, et qui était donc auréolée pour Sylvain et moi d'une sorte de mystère qu'il était tentant de percer. Devant mon building avec un Darius (cf. lexique) qui avait une galerie pendant 4 ans, à Paris (« I lôôôve Paris ! ») et commençait à nous parler de ceci-cela jusqu'à nous abandonner pour trois femmes motivées pour se lancer dans l'escalade des trois étages.
Vers minuit 20, nous avons pu envisager de monter. Accompagné d'une canadienne qui par questions successives a contraint Sylvain à lui refaire son CV. Je vais vite sur cette petite heure, où tous les gens que nous avons vu monté avaient l'air un plus moches d'être entassés là abreuvés d'alcool gratuit. Nous avons pu apprécier un peu New-York vu d'un toit, ainsi que la centaine de tableaux divers accrochés au mur sur les deux étages que comptait l'appartement. Passons sur le lap-dance d'une poupée russe en oreilles de Minnie, les quelques ébauches de conversation entamées au milieu de ces gens, la place importante occupée dans le séjour par ceux qui attendaient pour les toilettes et les quelques autres absurdités des lieux dont l'intérêt était d'être suffisamment peu amusant pour mériter ma curiosité d'y voir tant de gens simulant la joie.
Vers une heure trente, nous retrouvons Carolyn que nous n'avons pas croisé de la soirée, en bas de l'immeuble. Le retour en taxi se fera sur le thème des grandes figures romantiques de l'histoire des mathématiques et l'éblouissante beauté du monde de la mathématique, essentiellement alimenté par Carolyn. Pourquoi pas.
New-York, City. Manhattan (« l'île vallonnée »)
Les bonhommes verts, c'est ces quelques dizaines de reproductions à taille humaine des feux verts pour pietons de part les villes du monde. Extrait :
La flèche sous la statut de la liberté marque un pèlerinage vers les quartiers irlandais de Staten Island, l'un des districts de New-York (Manhattan en étant un autre) où se situe officiellement la meilleure série télévisée de KD2A "Parents à tout prix" qui a marqué mon enfance et qui représente aujourd'hui l'une des sources d'inspiration principale dans la vie de Sylvain Carré. Malheureusement, cette série est en fait tournée dans des studios en Californie et aucun lieu n'existe. Toujours est-il que le bateau qui emmène sur cette île longe la statut de la liberté (ça, c'est fait, et en vrai elle semble petite) et donne des vues fantastiques sur la skyline des buildings du quartier financier, nord-Manhattan.
Carolyn
Le matin, démarche de singe brutale. Il faut du café. Peu de mots, tête baissée.
Journée mystérieuse, toujours dehors jusqu'après 23 heures. Je l'imagine à beaucoup découvrir les rues et les cafés de New-York, mais au fond je ne sais.
Asiatique, cheveux blondis, jolie et théâtrale. Se décrète intelligente, constamment. Se trouve créative et c'est sans doute très vrai. Se met en scène. J'aime particulièrement sa position buste en avant, tête penchée sur sa gauche, sourire en coin, pour imiter les Golden Boys (garçons en or) américains, réussissant dans la finance, du haut de leur salaire exorbitant et de la haute estime qu'ils ont d'eux. Car Carolyn s'en moque, elle les laisse parler d'eux toute la soirée, avant de leur montrer qu'elle est plus intelligente qu'eux et de les laisser à leur solitude : « You want to fuck me, but fuck off ! », qu'elle dit ! Qu'on pourrait traduire par « Tu veux me baiser mais va te faire foutre ! », ce qui s'explique en partie car elle est jolie. Mais en général, elle n'est pas vulgaire.
Ce que Carolyn aime bien, ce sont les matheux. Depuis quelques temps, elle s'est plongée avec des délices incroyables dans la mathématique. Qu'est ce que le point de vue topologique nous apprend sur les objets, comment penser la question du tri d'une liste par des algorithmes, qu'est ce que la théorie de la complexité... « Si un gars m'apprend des maths, il peut me faire ce qu'il veut ! » Certes. Elle a commencé une collection : des boyfriends dans chacune des branches des mathématiques. Pour l'instant, elle en a deux. Si toutes les filles étaient comme elles, les matheux seraient en pratique bien moins névrosés.
Lexique
Darius : individu bourlingueur, ayant vu le monde dans ses grandes largeurs, d'environ cinquante ans (ou plus), vêtu élégamment et donnant une première impression de charisme, ayant développé l'aptitude d'être totalement plat bien que sympathique dans tous ses propos. Bref : individu que les voyages, vécus en quantité, ont rendu amical mais laissé fade. Inspiré d'un joueur d'échecs, Darius dePolléon, rencontré à Paris en 2007.